Je sais bien que c'est une quête sans fin. Il se peut très bien que la matière noire n'ait jamais existé et que les observations étranges de rotation des galaxies soient dues à autre chose comme des effets de la gravitation encore totalement incompris. Mais on cherche quand même cette matière noire. Il faut chercher cette possible explication. Pour se rassurer ou pour se dire qu'on a bien cherché toutes les pistes, même les plus loufoques. C’est vrai que ça peut paraître presque trop simple : les étoiles des galaxies tournent trop vite par rapport au cas où elles seraient les seules présentes, alors on imagine qu'il y a une autre matière massive qui les englobe, mais qui est invisible. Facile.
On a du
mal à imaginer les quantités phénoménales de particules en tout genre qui nous
traversent à chaque seconde. Déjà, imaginer des photons, qu'ils soient de la
lumière visible, infra-rouge ou des rayons gamma n'est pas aisé, mais quand on
évoque des neutrinos ou des muons, c'est encore plus ardu, alors des WIMPs...
C'est pourtant indispensable de penser les WIMPs, de les imaginer filant à
grande vitesse tout autour de nous, de les voir traverser son propre corps sans
aucune interaction, et de les visualiser en train de collisionner un noyau
atomique de xénon de notre détecteur puis repartir dans une autre direction
vers l'autre bout de l'univers.
J'essaye
de voir les WIMPs, je me les imagine comme des sortes de petites boules formant
un flot ininterrompu, coulant toujours dans le même sens, le sens inverse du
mouvement de la Terre, le flot traverse absolument tout, comme un éther. On est
baigné dedans, il nous englobe, nous pénètre, nous sommes faits de WIMPs.
Le
principe de la chambre à projection temporelle au xénon diphasique est vraiment
ingénieux, quand on y pense. J'aurais aimé trouver cette astuce qui permet de
localiser l'interaction. Si il n'y avait pas ces foutues impuretés
radioactives, tout serait tellement plus simple. Ce putain de radon... et ce putain
de krypton aussi. Des vraies saloperies qui viennent produire un signal
d'ionisation dans le gaz similaire à ce qu'on obtiendrait par une collision de
WIMPs. Comment trier le bon grain de l'ivraie dans ce cas ? Et bien on ne peut
pas, ou très difficilement, et donc ne pas avoir ces impuretés au départ. C'est
toujours facile à dire ou à écrire. Mais pour le faire ? J'entends encore le vieux qui disait
"Vous n'avez qu'à utiliser du xénon ultra-pur!". Je me demande s’il
sait comment on extrait le xénon de l'air liquide. En fait non, je ne me le
demande même pas, il est évident qu'il n'en a jamais eu la moindre idée.
C’est un
fait, les détecteurs qui utilisent deux types de signaux sont les plus
performants, que ce soient des détecteurs bolométriques ou des détecteurs comme
le nôtre, une chambre à projection temporelle. Les deux signaux qu'on obtient
quand une particule produit une interaction dans le volume liquide de xénon :
le signal de luminescence d'un côté et le signal de charge électrique de l'autre,
fallait y penser. Et la superbe astuce qu'on utilise dans l'exploitation de ces
deux signaux, le fait qu'ils n'apparaissent pas en même temps : le signal de
lumière quasi instantané, et le petit courant électrique légèrement après, le
temps que les électrons remontent du point d'interaction jusqu'à la surface de
la chambre, si c'est pas du domaine de l'astuce géniale... C'est la mesure du temps de transfert des
électrons, qui migrent toujours à la même vitesse dans le xénon, qui donne la
localisation en profondeur de l'interaction. C'est tellement beau, et ça marche
tellement bien. On pourrait même dire trop bien.
Maintenant,
c'est sûr que les mecs de XENO sans Donnelly ne pourront pas finir leur
installation avant la fin de l'année, ils sont foutus. On pourra récupérer
toute la production de l'année de Grüber&Thorp... Quand je pense que ces
gars ont fait encore mieux que ce que j’avais pu imaginer, des fois ça me fout
le frisson. On va enfin pouvoir se régaler !...
***
Cristina
connaissait assez bien l'informaticien du centre, un dénommé Paolo, qui était
assez jeune, une petite quarantaine, encore célibataire et qui était parti pour
le rester un bon moment. On aurait dit qu'il ne s'intéressait pas du tout aux
femmes, il était pourtant sympathique à regarder et affable. On ne lui
connaissait pas non plus d'autres penchants. Il préférait simplement la
compagnie de son chien qu'il avait appelé Linux, comme par hasard. Dire qu'il
était un nerd était plus proche de la
réalité que le qualifier de simple geek. Cristina, pour mener à terme sa petite
enquête sur l'identité de ceux qui auraient pu accéder et modifier le logiciel,
commença à se rendre plus souvent aux bureaux, c’est-à-dire à partir un peu
plus tard du centre le matin pour rejoindre la grotte. Elle préférait de toute
façon y travailler quand il faisait nuit. Elle prit l'habitude d'arriver au
Centre sur le coup des 8h30 puis de trainer à droite et à gauche en faisant le
tour des machines à café jusque vers 10h, où elle prenait soit le minibus ou
soit une voiture de service pour se rendre à la grotte et justifier son
salaire. Paolo arrivait tous les jours de très bonne heure. Il était le plus
souvent déjà à son poste depuis une bonne heure quand Cristina déboulait dans son
bureau pour le saluer et entamer une conversation sur n'importe quel sujet.
Un matin,
cela devait faire une semaine depuis son audition avec Hooper, elle aborda avec
Paolo le sujet des langages informatiques, elle commençait à étudier très
sérieusement le langage Python en vue de l'utiliser dans les analyses de
données de l'expérience. Ça lui avait permis d'engager la discussion très
naturellement.
— Y'a
tellement de langages différents, que ce soit en informatique scientifique ou
en informatique de gestion...
— Oui,
c'est sûr, encore qu'il y en a peut-être moins que tu ne le penses dans le
domaine des logiciels de gestion, répondit Paolo
— Ah
ouais ? Généralement c'est écrit en quoi, tous ces logiciels ?
— Ça
dépend, y'en a encore beaucoup qui sont des bons vieux Visual Basic, mais on a
aussi des applications très chiadées qui sont écrites en C++ ou en Java.
— Et
quand il y a des bases de données à gérer ?
— Là, le
plus souvent, c'est une gestion par système de requêtes SQL, et ça peut être
implémenté dans à peu près n'importe quel langage...
— Ah
ouais, d'accord, c'est très adaptable alors...
— Ben
ouais, c'est ce qui rend le truc cool, tu vois. Tu peux complètement gérer ta
base de données avec plusieurs types de logiciels, même avec différents langages.
Tu peux par exemple avoir un certain logiciel qui remplit une base de données
et un autre logiciel qui va modifier cette base de données dès qu'il a détecté
qu'elle a été remplie par le premier. Ils peuvent utiliser tous les deux le
même genre de requêtes pour faire ça, mais être structurés en interne
complètement différemment.
— Tu veux
dire que deux logiciels très différents peuvent interagir avec la même base de données
de manière complètement indépendante ?
— Ouais,
il suffit juste d'utiliser le bon protocole.
— Et
c'est facile de connaître le bon protocole quand on a une base de données sous
les yeux ?
— Bah,
dans quatre-vingt-dix pourcents des cas, c'est du SQL, alors...
— OK,
effectivement, ça parait simple comme bonjour... Le logiciel de gestion des
badges par exemple, il marche comme ça ?
— Ouais,
exactement, c'est du simple et robuste... rétorqua Paolo.
Ce que
Cristina avait découvert était du lourd, il n'était aucunement nécessaire de
modifier le logiciel de gestion lui-même, mais juste d'introduire un second
logiciel, comme un logiciel espion, qui pouvait modifier directement le contenu
de la base de données à chaque fois que celle-ci était mise à jour par le
logiciel de gestion. Si quelqu'un avait juste pu introduire une clé USB dans la
machine de Paolo et installer ce genre de logiciel, ça suffisait à produire le
résultat qui avait été obtenu.
Plutôt
que d'interroger à outrance Paolo pour savoir qui était entré dans son bureau
durant les semaines précédentes, Cristina préféra faire de l'observation in
situ. Par chance, le bureau de Paolo était visible depuis le petit salon où se
trouvait la machine à café. Ce n'était pas à proprement parler un salon, mais
il y avait tout de même des fauteuils, quatre, et une sorte de sofa, qui
permettaient d'attendre des personnes assez confortablement, par exemple le
matin avant de partir ensemble pour la grotte. Tous les chercheurs devaient
obligatoirement passer au Centre le matin, on ne pouvait pas se rendre
directement au laboratoire souterrain. C'était différent le soir.
Cristina
passa plusieurs jours d'affilée à observer qui entrait dans l'antre de Paolo
pour le saluer et qui apparaissait ainsi naturel de voir dans son bureau. Pour
cela, elle s'installa avec aplomb dans le petit salon et se força à absorber
nombre de cafés et discuter, le plus souvent de Matthew, avec tous ceux qui
passaient par là. Elle se disait qu'il était beaucoup plus facile de glisser
rapidement une clé USB dans la machine de Paolo à son insu que de lui extorquer
son mot de passe, surtout avec un nerd
comme lui. Avec un chien appelé Linux, il devait avoir un mot de passe
monstrueux, sûrement à base de termes issus de mangas ou d'autres subtilités du
genre, et il devait en changer tous les mois, voire plus fréquemment.
Elle se
mettait dans la peau de celui qui avait voulu faire ça. Si elle était lui –ou
elle–, elle aurait tout d'abord sympathisé avec Paolo depuis un petit moment,
puis elle serait passée systématiquement tous les jours dans son bureau pour
papoter quelques minutes, afin de paraître non seulement inoffensif, mais aussi
accepté d'être vu dans ce bureau par tous ceux qui passaient dans le couloir à
cette heure-là ainsi qu’à la secrétaire dont le bureau était situé de l'autre
côté du couloir, pas immédiatement en face mais trois mètres en décalé sur la
gauche, et qui pouvait très bien voir les allée-venues.
Cristina
savait très bien feindre la fille dépressive, ce qui lui donnait, vue la
situation, une bonne couverture pour rester à traîner un peu longtemps dans le
salon du rez-de-chaussée.
Tous ceux
qui passaient chaque jour venaient la réconforter. La mort de Matthew l'avait
profondément marquée mais elle ne s'était jamais sentie abattue, au contraire,
elle était maintenant pleine d'énergie, surtout depuis que Hooper avait accepté
qu'elle "travaille" pour lui.
Au bout
d'une semaine de ce petit jeu, le constat était très simple. Paolo était donc
un vrai nerd, du genre isolé. Elle ne
l'aurait jamais cru. A part elle, il n'y avait qu'une seule personne qui
entrait chez Paolo pour taper la discute, les autres le saluaient le plus
souvent très vite, un rapide "hello Paolo" avec un geste de la main,
ou bien un "Bon giorno!" respectueux. Mais l'autre Paolo, Paolo
Pascali, lui, entrait systématiquement chez Paolo le nerd et pouvait ressortir du bureau parfois dix bonnes minutes plus
tard.
Le
lendemain, quand Cristina croisa la secrétaire d'en face, elle lança, sous
l'air d'une boutade :
— On
dirait qu'ils ont l'air de bien s'entendre les deux Paolo !..
— Ah,
oui..., répondit la quinqa, il vous a avoué quelque chose ? demanda-t-elle en
baissant la voix.
— Avouer
? Avouer quoi ? Euh, non, non, pourquoi ?
— Bien,
je me demande s’ils ne seraient pas...
— Ah non,
non... je ne crois pas du tout, Paolo, notre as des ordinateurs, ne pense qu'à
l'informatique!, répondit Cristina, qui se demandait si son entrée en matière
avait été judicieuse finalement.
— C'est
que..., ça ne fait pas très longtemps qu'on les voit souvent ensemble. Avant,
l'autre Paolo l'ignorait presque...
— Ah oui
? Je n'avais pas remarqué, fit Cristina en feignant de s'intéresser aux ragots
de couloirs, ça fait depuis combien de temps ?
— Oh, et
bien depuis le début du mois de février je dirais...
— Ce
n'est pas ce que vous croyez, répondit Cristina pour sauver ce qu'elle pouvait
sauver... ils sont juste devenus des amis, rien de plus. Je crois qu'ils aiment
tous les deux les mangas, ces BD japonaises... Ça rapproche...
Cristina
connaissait l'intérêt de l'informaticien pour la culture japonaise mais
ignorait bien sûr tout de Paolo Pascali, qu'elle connaissait très mal.
***
— Paolo
Pascali. Il est ingénieur ici au LNGS. Il ne dépend pas d'un institut d'une
autre région, il travaille ici toute l'année. Il est responsable des mesures de
spectrométrie gamma à ultra-bas bruit. C'est le seul, d'après ce que j'ai
déduit, qui aurait pu introduire un logiciel malveillant dans le système via un
accès facile au bureau de l'informaticien qui gère la machine. Il semble s'être
rapproché de l'informaticien il y a seulement peu de temps et maintenant ils
paraissent être très proches, ce qui n'était pas le cas il y a encore deux
mois. Or, ils travaillent tous les deux au Centre du LNGS depuis plusieurs
années...
— Intéressant...
Et personne d'autre ? demanda Hooper.
— A mon
avis non, sauf Paolo Ferrari, l'informaticien lui-même...répondit Cristina en
faisant comprendre qu'elle n'y croyait pas du tout. Paolo Ferrari est un peu
étrange, un peu introverti, et du coup très peu de gens osent entrer dans son
bureau.
— OK.
Deux Paolo... Ça ne va pas nous aider, ça. Pour tout dire, Paolo Pascali a été
l'un des premiers que j'ai auditionné parmi les sept qui étaient au laboratoire
souterrain le 24. Et je dois dire que je l'ai trouvé un peu bizarre...
— Bizarre
comment ? se risqua Cristina.
—
Bizarre... reprit Tom Hooper sèchement, qui ne savait pas trop s'il devait
donner des détails à la jeune femme.
— Est-ce
que je pourrais venir vous voir cet après-midi ou demain matin ? demanda
Cristina sans plus de précisions à l'agent Hooper.
— ... Je
suis occupé toute la journée aujourd'hui, et demain matin je retourne au
laboratoire souterrain, mais seulement pour inspecter l'extérieur... Mais, si
vous voulez, on pourrait se voir ailleurs qu'au commissariat, demain soir ?...
— Je
serai aussi au labo demain, mais à l'intérieur, moi... répondit Cristina en
souriant. Mais demain soir, oui, c'est bon pour moi... Est-ce que vous
connaissez un bar qui s'appelle La Taverne, à Assergi ?
— Oui, je
vois où c'est, on ne peut pas le rater. L'enseigne est plutôt voyante quand on
est sur le pont... 21h, ça vous irait ?
proposa Tom Hooper.
— OK, je
ferai un effort pour quitter un peu plus tôt que d'habitude. A demain alors.
— A
demain et merci pour le tuyau, Cristina. Puis il raccrocha.
Curieuse coïncidence tout de même que ce Paolo
Pascali ait pu avoir potentiellement accès à la base de données du logiciel de
gestion des entrées-sorties, qu'il ait été présent ce soir-là et qu'il ait
répondu lors de son audition avec une pointe de nervosité sur des questions
parfois banales...
Tom
Hooper se replongea dans le compte-rendu d'audition de Paolo Pascali, et dans
le même temps, réécouta très attentivement l'enregistrement qu'il avait
transféré sur son ordinateur avec tous les autres. Le son de ce petit
enregistreur fourni par le Bureau était de très bonne qualité, il s'en
félicitait à chaque fois qu'il réécoutait un enregistrement.
—...
Paolo Pascali, vous êtes ingénieur ici au laboratoire souterrain du Gran Sasso
depuis 2009...C'est ça ?...
— Oui,
tout à fait, je suis en charges des mesures de radioactivité à très bas niveau
avec les détecteurs qui sont installés au laboratoire souterrain. J'y suis très
souvent pour mettre en place les échantillons à mesurer ou faire des
étalonnages des détecteurs....
— Bien,
et donc, le soir du 24 février dernier, vous étiez encore là à 22h45... Quelle
en était la raison ?
— ...euh,
oui, j'étais là... j'étais en train de... j'étais en train de lancer une
nouvelle mesure sur un échantillon de grande taille..., disait la voix de
Paolo.
Le son
était limpide, on entendait parfaitement, jusqu'aux petits bruits que faisait
le témoin avec sa bouche, en se tordant légèrement les lèvres par moments.
— Vous
travaillez souvent tard au laboratoire ?
— Ça
m'arrive assez souvent, oui... En fait je n'ai pas trop le choix, nous avons
des contraintes de temps énormes. Une fois que les détecteurs sont descendus en
froid, il faut les exploiter, vous comprenez. J'ai un planning expérimental qui
déborde complètement. Et là en ce moment, c'est pire que tout.... Sur trois
détecteurs, j'en ai est un qui est en panne, alors je dois tout faire avec les
deux autres, sauf que pour les gros échantillons, je dois démontrer le château
de plomb qui l'entoure, et quand on fait ça, il faut refaire toute la procédure
d'étalonnage, vous comprenez...
— Oui, je
comprends... Je connais la spectrométrie gamma, répondit Tom Hooper.
— Ah,
vous connaissez ...? répondit Paolo étonné de parler à un inconnu prétendant
connaître sa spécialité.
Tom
Hooper avait enchaîné sans s'étendre.
— Vous
étiez dans la salle de mesure quand l'alarme a retentit ?
— Euh...
quand ça a sonné, et bien... euh, oui... c'est ça, j'étais devant l'écran du PC
d'acquisition, je venais juste de refaire un run d'étalonnage avec la source
d'europium...
— Et
est-ce que vous avez arrêté votre acquisition de données quand vous l'avez
entendue ? avait demandé l'agent du FBI
— Non, je
suis tout de suite sorti pour aller voir ce qu'il y avait et pour me rendre au
point de rassemblement, comme il faut faire...
— Combien
de temps avez-vous mis pour rejoindre le point de rassemblement, dans le hall
B, c'est ça ?
— Oui,
c'est au bout du hall B, pas loin du couloir menant au hall A. La salle de
mesure de spectrométrie gamma se trouve de l'autre côté du hall B, c'est une
salle annexe qui peut être accédée également directement par le hall C. Combien
j'ai mis de temps ? Euh... avait semblé hésiter Paolo, je ne sais pas... je
n'en ai aucune idée, je n'ai pas couru, j'ai juste marché vite, j'imagine qu'il
ne m'a pas fallu plus d'une minute...
— Et
avant l'alarme, vous n'avez rien remarqué d'inhabituel dans le hall B ?
— Non, la
porte de la salle de mesure était fermée, je ne pouvais pas voir ce qui se passait
dans le hall...
Tom
Hooper avait poursuivi :
— Vous
connaissiez Matthew Donnelly ?
— Juste
comme ça, on se disait bonjour, mais je ne le connaissais pas très bien. Je
vais souvent chercher des bouteilles d'azote dans la salle de stockage, vous
voyez, je passe donc toujours devant les installations de XENO avec le petit
chariot, il était souvent présent avec son équipe ses derniers temps...
— Vous
êtes sensibilisés au risque d'anoxie, vous qui manipulez des bouteilles de gaz
sous pression ?
— Bien
sûr!... Il y a des sessions fréquentes de formation sur la sécurité, dans tous
les secteurs. C'est quelque chose qui est pris très au sérieux ici au LNGS. Le
risque d'asphyxie et d’anoxie est peut-être le plus important ici après le
risque d'incendie. C'est lié, d'ailleurs... avait répondu Paolo Pascali, avec
un ton un peu professoral.
— Et
Matthew Donnelly avait également suivi ces formations ?
—
Théoriquement oui, je ne saurais pas vous dire de quand date son dernier
recyclage, c'est comme ça qu'on appelle les rappels que l'on doit suivre, mais
c'est sûr qu'il n'a pas pu passer à côté. Et généralement les chercheurs jouent
le jeu. On ne rigole pas avec la sécurité... mais bon, il se peut que des fois,
on loupe des choses...
— Comment
ça ? avait demandé Tom Hooper presqu'en lui coupant la parole.
— Il peut
arriver de rares fois qu'on ne respecte pas tout à fait les consignes à la
lettre...
— Pour la
manipulation des bouteilles de gaz ?
— Oui...
euh..., disons que ça peut arriver quelques fois, quelques rares fois...
enfin... je parle pour ce qui me concerne... disait l’ingénieur dont Hooper se remémorait
le visage sec aux tempes grisonnantes.
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